Au cœur des Hauts-de-France, la « petite Venise du Nord » est devenue en quelques années une ville verdoyante où il fait bon vivre au bord de l’eau. Maire d’Amiens depuis 2014, Brigitte Fouré nous explique comment cette ville d’art et d’histoire, connue pour son beffroi, sa cathédrale et ses canaux, relève aujourd’hui avec brio les défis de la transition écologique, de la citoyenneté et de l’attractivité…
Depuis votre première élection en 2014, comment le contexte économique d’Amiens a-t-il évolué ?
Brigitte Fouré : Les années 2014 et 2015 ont été marquées par la fermeture de l’usine Goodyear, la délocalisation de l’usine de sèche-linges Whirlpool et la suppression de notre statut de capitale régionale dans le cadre de la réforme territoriale. Mais il faut croire que ces difficultés nous ont incité à rebondir, car aujourd’hui Amiens est une ville à haute qualité environnementale, fière de son patrimoine et de son histoire, qui peut s’enorgueillir d’être l’une des métropoles les plus attractives pour les industriels et les entreprises du secteur tertiaire. En 2017, l’arrivée d’Amazon a été un signal fort pour les dirigeants, qui sont attirés non seulement par un cadre de vie proche de la nature, mais aussi par notre pôle d’excellence santé et nos nombreux centres de recherche, comme celui sur les batteries sodium-ion, où les chercheurs cherchent des alternatives au lithium. Nous accueillons également des start-ups, comme Ÿnsect, qui devrait construire sur notre territoire la plus grande ferme verticale du monde, où seront bientôt élevés des scarabées destinés à produire des engrais…
À moins d’une heure et demie en train de Paris, pensez-vous attirer également des Parisiens en quête d’une meilleure qualité de vie ?
BF : Bien sûr, d’autant plus qu’avec le développement du télétravail, il devient tout à fait envisageable d’habiter près de la gare, de travailler en région parisienne 2 ou 3 jours par semaine et de rentrer le soir se promener dans les hortillonnages. Il faut aussi savoir que nous avons été retenus parmi 72 villes pour accueillir les archives presse de la BnF (Bibliothèque Nationale France), qui seront bientôt installées dans l’ancien CHU Nord. Et nous attendons de savoir si notre candidature est retenue pour être Capitale Européenne de la Culture en 2028.
Arkéa Banque E&I a également soutenu la transition énergétique d’Amiens en co-finançant un réseau de chaleur extrêmement performant, où en est-il aujourd’hui ?
BF : Effectivement, la ville a pu jouer son rôle de levier de développement grâce à la création d’une SemOP, qui réunit l’exploitant du réseau de chaleur (Engie Cofely), la municipalité et la Caisse des Dépôts. Après deux années de travaux de 2016 à 2018, notre réseau de chaleur alimente aujourd’hui 19 000 foyers en chauffage et eau chaude, ainsi que des commerces, des lycées et d’autres bâtiments publics. Son mix énergétique, unique en France, est composé à 62% d’énergies locales, renouvelables et de récupération, ce qui est plus économique, mais permet surtout d’éviter l’émission de 15 000 tonnes équivalent Co2 chaque année. Et comme tous les Amiénois n’en bénéficient pas directement, nous avons décidé de réinvestir les 400 000 euros versés par la SemOP pour l’occupation de l’espace public aux particuliers qui veulent effectuer une rénovation énergétique de leur habitation. Le réseau devient ainsi vertueux pour tous.
Quels sont les autres défis que vous souhaitez relever à l’avenir ?
J’aimerais qu’Amiens devienne une véritable ville citoyenne qui favorise le lien social. En étant tous différents, il est essentiel que nous arrivions à vivre ensemble en sachant faire preuve de générosité et de solidarité, à l’image de Saint Martin qui a donné son manteau dans notre ville. Nous y travaillons avec la création de vergers partagés, de lieux apaisés, mais aussi d’initiatives comme la Journée Citoyenne ou le budget participatif. Sur le plan environnemental, nous avons également de nombreux projets en cours, comme la création d’ilots de fraicheur, la plantation de nombreux arbres, la désartificialisation des sols et des cours d’école, ou encore la création d’une grande ferme solaire et le développement du réseau de chaleur. Il reste encore beaucoup de choses à faire, mais nous avons bien l’intention d’être exemplaires.